15 avril 2010 : malgré des résultats trimestriels atteints, dont une croissance de 7%, l’action du groupe Danone baisse de 1,56%. La raison de cette baisse ? Un minuscule petit point de rien du tout dans le communiqué présentant les résultats, à propos d’un changement de stratégie de communication pour une gamme de produits. Et c’est ce changement qui a fait plonger le titre.
En cause, la décision de Danone de retirer ses demandes de labellisation santé pour les yaourts Activia et Actimel, officiellement pour un « manque de visibilité dans l’application du règlement européen », mais officieusement pour ne pas subir un refus probable de labellisation, voire pour anticiper sur des critiques quant aux effets néfastes de ces produits. C’est que, depuis le début, toute cette gamme a été fondée sur un artifice de communication, prétendant que ces yaourts renforçaient les défenses naturelles et facilitaient la digestion.
La communication irresponsable paie-t-elle jamais ?
La première réflexion que m’inspire cette annonce tient en une formule expéditive, pas trop subtile et pourtant tellement juste : et pan sur le bec. Avouez que cette décision pouvait arriver à n’importe quel moment, et que la supercherie allait être intenable un jour ou l’autre. Bien des ingrédients d’une communication irresponsable étaient réunis : mensongère, culpabilisatrice, exploitant les faiblesses et les peurs, utilisant le matraquage publicitaire malheureusement classique, jouant sur les stéréotypes, tenant un discours pseudo-scientifique, n’offrant pas de preuve, se basant sur des études douteuses…
En première analyse, j’aurais donc tendance à voir un signe qu’une communication irresponsable ne paie jamais. Que la tromperie n’est jamais récompensée. À ce titre, les quelques réactions à l’article du Monde sont éloquentes du ressentiment qu’a engendré une telle stratégie. La confiance que gardent visiblement de nombreux consommateurs devrait s’effriter notablement. C’est bien l’avenir de la filière des alicaments de Danone, qui représente près de 25% de son chiffre d’affaires, qui est en danger.
Raison garder…
N’allons tout de même pas rêver à un arrêt pur et simple des alicaments. On en est loin. Et même en termes de communication, le changement d’orientation de Danone ne sera peut-être que léger. Je vois mal toute une stratégie s’effondrer du jour au lendemain, vu les investissements réalisés et l’importance cruciale de cet argument. Sans utilité scientifiquement prouvée, difficile de justifier le prix bien plus élevé que pour les yaourts classiques. Et on ne voit pas Danone abandonner complètement ce créneau. Il faut plutôt s’attendre à un jeu sur les mots, une promesse légèrement dégonflée ou de nouveaux arguments mis en avant. Quoi qu’il en soit, on attend la prochaine campagne avec intérêt !
Cette actu me rappelle une présentation mémorable, à l’école de communication où j’ai usé mes culottes courtes, qu’avait faite un de mes congénères à propos de ces probiotiques. Il lui avait été impossible de même imaginer une seule seconde qu’ils puissent ne pas avoir de bénéfice réel. En réponse à mes questions, tous les grands dieux de la science avaient été invoqués, et la suggestion que le « L. casei defensis » était un artifice de présentation inventé de toutes pièces par Danone avait été rejetée fermement. Je lui dédie ce billet, en toute amitié…
Crédit photo : XavMP, sur Flickr, image mise à disposition sous un contrat Creative Commons by-sa.