Le 8 décembre dernier, j’animais un événement organisé par l’association Place de la Communication, dont je suis un heureux adhérent. Je veux remercier chaleureusement Magali Fosse et Noémy Messi Fouda, qui ont organisé de main de maître ce déjeuner-conférence, qui s’est tenu dans le cadre très agréable (visuellement et gustativement !) de la coopérative Baraka, à Roubaix. L’événement comportait 2 parties : une conférence proprement dite, et un atelier.
Si tant est que l’on puisse reproduire en un article de blog le contenu d’un événement, voilà ce que j’ai raconté :
La conférence visait à donner les grandes lignes de ce qu’est la communication responsable, telle que je l’entends (et pas que moi !). La communication responsable n’est pas une affaire de préservation de la planète, d’enfants qui seraient notre raison d' »agir bien », ou encore de jolis visuels à base de vert. Il est essentiel de faire la différence entre la communication RSE et la communication responsable.
Cette théorie et pratique de la communication est née en réaction à deux changements qui ont profondément bouleversé notre profession. D’abord, la crise environnementale et systémique (les 2 faces d’une même pièce) a fait que la consommation n’est plus une source de plaisir infini et insouciant. Et comment continuer à assumer la mission de vendre, qui est constitutive de la communication commerciale, dans un monde dont il est de plus en plus évident qu’il vit au-dessus de ses capacités matérielles ?
Second bouleversement, Internet, qui vient principalement mettre à mal la place de dominant de la communication. D’un coup, la contestation devient visible. L’affaire Nestlé/Kit Kat de 2010 le montre bien : une campagne au budget assez modeste a réussi à faire plier en quelques semaines une des plus puissantes multinationales. Avec Internet, on ne peut plus faire comme si les désaccords n’existaient pas, et passer en force.
Internet met donc en lumière les pratiques les moins reluisantes de la communication. Pratiques qui existent depuis bien longtemps, et qui perdurent aujourd’hui encore. La principale, c’est l’attitude des communicants qui sont complètement coupés du terrain, et qui décident unilatéralement quelle sera l’image de leur marque. Le slogan d’Isotoner ci-dessus en est l’illustration la plus flagrante : il ne fallait pas avoir lésiné sur la fumette qui fait rire et qui rend bête pour associer « pour plaire » à cette marque qui est tout sauf axée séduction (je suis preneur de toute histoire prouvant le contraire, et déclarerais alors mon admiration sans limite à ceux qui sont capables de séduire avec des pantoufles Isotoner).
Le résultat de ce contexte et de ces pratiques, il est le suivant : un profond et durable manque de confiance dans les marques et dans la communication. De nombreuses études l’attestent, et je vous laisse aller les chercher une par une pour vous rendre compte à quel point la situation est sérieuse.
C’est une communication responsable très différente de la communication environnementale, pour laquelle j’ai deux définitions. La première insiste d’abord sur une visée universelle : on doit pouvoir faire de la communication responsable sur n’importe quel sujet et n’importe quelle discipline de la communication, de la communication interne aux relations publiques en passant par la communication financière (soyons fous). Il ne s’agit également pas d’une vision morale, mais d’une recherche d’efficacité, de ce qui est dans le meilleur intérêt de l’annonceur.
Et si l’on devait simplifier à l’extrême la communication responsable, cela serait sans doute ainsi que je la définirais (et j’ai déjà eu l’occasion d’expliquer le pourquoi de cette définition).
Les mots-clés sont :
– la confiance, qui est le principal objectif ;
– une confiance que l’on atteint en écoutant avant de parler et d’agir (ce qui est le principe de base du design thinking) ;
– on vise une efficacité réelle (donc autant quali que quanti) et sur le long terme ;
– on s’exprime quand on est légitime pour le faire ;
– quand on est légitime, il est facile d’apporter des preuves à tout ce que l’on avance ;
– le discours doit être cohérent (dans toutes les dimensions de la cohérence) ;
– la marque doit être sincère ;
– on écoute, puis on parle, puis on dialogue, pour avoir des retours et ne pas laisser de malentendus.
Il est important de préciser que cette communication responsable n’est pas un absolu – ce en quoi l’expression est assez mal choisie. C’est une attitude, une façon de pratiquer. On n’a pas encore vu et on ne verra sans doute jamais une campagne qui soit 100% communication responsable. Et ce n’est pas le but ! Le but, c’est d’être juste, et de servir au mieux les intérêts de l’annonceur, comme dans les exemples suivants :
– Campagne pour les Apprentis d’Auteuil, où l’on ne cherche pas à nier les difficultés de ceux qu’elle accueille, mais au contraire à s’appuyer sur cette réalité ;
– Campagne de la Camif sur le made in France, avec des preuves (interviews des fournisseurs), et avec du flawsome, cette pratique qui vise à parler de ses défauts au lieu d’essayer de les cacher – j’aurais par ailleurs beaucoup à dire sur la cohérence entre le discours de la Camif et la qualité des produits, mais c’est un autre sujet ;
– pour le dialogue, un très bon exemple est la Digital Acceleration Team de Nestlé, à Vevey, où tous les communicants des marques du groupe viennent apprendre à écouter ce qui se dit des marques sur Internet et à savoir quand et comment répondre.
La question qui se pose logiquement à tout communicant normalement constitué, devant une telle promesse, c’est : comment on fait ? Comment on s’organise pour réussir tout cela ? Axiome principal de la conférence (oui oui, il a osé) : « pas de bras, pas de chocolat ». On ne crée pas de la confiance, qui est le principal résultat des pratiques de communication responsable, avec des structures et des façons de travailler issues de la communication à papa.
Pour avoir des messages plus authentiques et des créas qui font mouche, on doit mieux intégrer les prestataires : une agence qui se contente du brief sans savoir exactement ce qu’est le produit/service ou ce qu’est l’annonceur a toutes les chances d’aboutir à un résultat artificiel voire mensonger.
Quand on veut apporter des preuves, on doit passer du temps sur le terrain, au contact du quotidien de l’annonceur et de celui de ses publics.
Quand on veut dialoguer avec les publics, il faut savoir qui s’en charge et comment organiser cette équipe.
Enfin, pour avoir une réelle efficacité, on ne mesure pas le nombre de coups de matraque qu’on assène sur son public, mais ce qu’il pense et ce qu’il fait de différent après l’action de communication.
Pour chaque atelier, j’ai demandé des pistes de réflexion (comment on peut faire pour y arriver !), mais aussi, parce qu’on est pas au pays de Candy (au moins aussi bien que les bisounours), quels sont les principaux freins.
Le résultat ? À l’image des professionnels qui constituent Place de la Communication : riche, divers, passionnant, marqué par l’expérience.
Si vous voulez avoir les quelques notes qui ont été prises après ces ateliers, 3 solutions :
- commenter cet article avec vos retours d’expérience !
- m’envoyer un mail à l’adresse yonnel AT communicationresponsable.fr
- en discuter autour d’une bonne bière, et comme on est en 2016, plus de la 16 que de la 16 😉
Crédit photo : les bons process, au tableau ! Via Shutterstock.
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