Je ne fais pas mystère de mon addiction aux conférences TED, parfois indispensables, parfois moins, mais en tout cas toujours d’utiles supports à la réflexion. TED a fait des petits : outre les déclinaisons nationales (dont TEDxParis), il existe le TED Prize, qui récompense chaque année trois personnalités et leurs projets pour rendre le monde un peu meilleur. À la clé, 100 000 $ et un appel à contribution autour du projet.
Influence culinaire
Le premier lauréat 2010 est connu, il s’agit de Jamie Oliver. Je dois le confesser, je suis fan de Jamie Oliver depuis 1999 quand j’ai découvert à la télé britannique son premier show TV, The Naked Chef. À poil, le chef ? Rassurez-vous, on parle bien de cuisine ! Le pitch : un jeune chef anglais cuisine chez lui, pour ses potes, sa famille. Une cuisine sans chichis, inventive et savoureuse, entre tradition anglaise revisitée et influences méditerranéennes. Je continue à m’inspirer de ces recettes et de ces conseils qui font de Jamie Oliver autre chose qu’un « chef de la télé ». Autant Cyrille Lignac est insipide, ridicule, artificiel et mauvais, autant Jamie est doué, profond, authentique et généreux.
The Naked Chef fut donc le début d’une belle série de programmes culinaires qui ont contribué à renouveler la gastronomie britannique. Car Mister Oliver n’est pas qu’un pro de l’image, il a des idées et des convictions. Après plusieurs variations sur The Naked Chef, il commence par monter un projet de restaurant social, autour de 15 jeunes apprentis chômeurs ou SDF. Le resto Fifteen à Londres existe toujours, il a même fait des petits à Amsterdam, en Cornouailles et à Melbourne, et il forme toujours des apprentis. Si c’est de la télé-réalité à l’anglaise, le fond est réel et pérenne.
Vive les utopistes (qui réalisent leurs rêves !)
En 2005, révolté par la piètre qualité des repas servis dans les écoles, il se fait engager comme cuisinier dans une école. Objectif, montrer qu’il est possible avec le budget imparti de proposer des repas équilibrés, frais et bons. Pour que cela marche, il faut éduquer les élèves, leur apprendre la tête qu’a un champignon et le goût qu’a un céleri branche. School Dinners est un succès au-delà des espérances. Les gens s’impliquent, les choses changent, les pouvoirs publics suivent.
Comme il est possible de changer les cantines, pourquoi ne pas changer une ville entière ? Challenge suivant : Jamie’s Ministry of Food. Une ville, Rotherham. Un mot d’ordre : Pass it on! (Partage !) En apprenant 10 plats simples et bons à quelques personnes, si la transmission se fait, les habitudes peuvent évoluer rapidement. (Là aussi, Cyrille Lignac s’y est essayé à Villers-Cotterêts, le talent et la substance en moins !!!) Réapprendre à un pays à cuisiner et à transmettre les savoirs essentiels, en voilà une idée qu’elle est bonne !
Si le loustic a été récompensé par TED, c’est pour son dernier projet : appliquer les recettes de Ministry of Food et School Dinners… à l’échelle des États-Unis d’Amérique. Food Revolution USA est ambitieux, c’est même de la folie. Mais c’est tellement sensé. Tellement essentiel. Et cela pourrait bien fonctionner. Voici l’intervention de Jamie lors de sa remise de prix, un modèle de conférence. Voyez comment il abolit la distance entre lui et le public, comment il s’investit, se laisse aller, comment il « agresse » le public, le bouge, le force à réagir. Impossible de rester indifférent, malgré un moment un peu limite. Et si l’alimentation était la première source des dysfonctionnements de notre société ?
On s’éloigne un peu de la communication responsable avec ce post. Enfin, pas tant que ça…
Crédit photo : redmaxwell, sur Flickr, image mise à disposition sous un contrat Creative Commons by-nc.