Où l’on se rend compte que la communication RSE n’est peut-être finalement pas tant une question de maîtrise de la RSE… que de maîtrise de l’anti-RSE. Tentative de démonstration.
Celui qui n’avait rien compris
Les échecs des campagnes de communication RSE peuvent se ranger grosso modo dans deux catégories. La première est la mauvaise maîtrise du sujet. C’est le cas le plus fréquent et le plus identifiable. Inculture crasse, mensonge pur et dur, exagération grossière, simplification trompeuse ou tentative de mystification… peu importe la cause, le résultat donne une (ou plusieurs) des 8 erreurs du greenwashing.
Les écoïstes de BMW sont le dernier exemple de cette inculture. Voiture (qui plus est grosse voiture avec un gros moteur) et écologie sont incompatibles. Au mieux, on peut communiquer sur une réduction de l’impact environnemental par rapport à ce qui se fait actuellement ; 99 fois sur 100, aller plus loin est abusif. Pour eux, la solution est, comme on le dit pudiquement, un fort besoin de montée en compétence (j’ai une autre version en magasin, mais on m’a dit que j’avais dépassé mon quota de grossièretés sur une année glissante). A priori, le conseil en communication leur est totalement inutile, le problème est bien en amont.
Celui qui avait compris l’essentiel mais se plantait quand même
Pour ceux qui ont un minimum de maîtrise du sujet, et dont les départements RSE et communication font correctement leur travail, une cause fréquente d’échec est souvent mal identifiée. Vous savez, de ces sujets qui semblent mystérieux et impénétrables. Nous avons tout bien fait comme il faut, nous avons apporté toutes les preuves de la sincérité de notre campagne, et pourtant nous nous sommes pris un retour de bâton sur Internet, la démarche a été critiquée. Mais pourquoi ? Que s’est-il passé ?
C’est en fait une question de dynamique, d’ancrage d’une perception chez les publics de l’annonceur, et au final de légitimité. Prenez la campagne « banque responsable » de BNP Paribas, l’année dernière. Un historique (le discours sur le parler vrai), un site web, une conférence intéressante et ouverte, une argumentation relativement solide… mais tout de même des critiques assez nombreuses, y compris une jolie nomination aux prix Pinocchio (avec contestation de l’entreprise – élégance quand tu nous tiens). Bilan : campagne plutôt mal reçue. Ce qui importe n’est donc pas ce que la banque a fait pour s’améliorer, mais ce que ses publics pensent qu’elle a fait. Et cela peut être très différent. Pour BNP Paribas, c’était suffisant. Pour ses parties prenantes, c’est insignifiant.
Conséquences et applications
Où regardent vos parties prenantes, et surtout les plus virulentes ? Elles ne regardent pas forcément là où vous voulez qu’elles regardent, elles ne regardent pas la beauté de votre action. Elles peuvent regarder dans l’autre direction. Elles recherchent peut-être des traces de laideur. Devant tout beau discours, elles cherchent souvent à dénicher les éléments qui vous contredisent. Oui l’époque est au scepticisme, oui c’est dommage, mais non nous ne pouvons pas faire comme si la situation était différente.
Pour BNP Paribas, elles regardent les articles réguliers épinglant les financements d’activités polluantes et les filiales dans les paradis fiscaux. L’opinion s’est cristallisée autour de cette idée, et bien maladroite est la tactique consistant à affirmer simplement le contraire… même avec des preuves.
Vous êtes une entreprise qui développe une gamme de produits de cosmétiques écolos, parfaits, avec le label le plus exigeant ? Aucune utilité si tout le reste ne l’est pas et que l’on vous attribue une image de produits chimiques. Vous avez engagé un nombre considérable de salariés handicapés, bien au-dessus du minimum légal de 6% ? Cela ne gomme pas l’image laissée par le conflit social que vous avez connu il y a 6 mois. Vous avez réduit de 30% la consommation d’énergie dans votre entreprise, alors que son activité est en croissance ? Insuffisant si l’activité première de votre groupe est associée à une activité réputée polluante.
La solution ?
La RSE n’est pas un concours de beauté. Par conséquent, une bonne préparation de communication RSE ne se résume pas à peaufiner une action ou un domaine spécifiques. Il faut avant tout traquer les signaux contraires. Vous êtes perçus comme n’ayant pas de légitimité sur un sujet ? Commencez par déminer le terrain, patiemment, à coup de reconnaissance des erreurs passées et de preuves de changement (ce qui impose effectivement de ne plus être pris les doigts dans le pot de confiture), avant de tenter de vous montrer sous votre meilleur jour. Ceci est vrai pour la RSE, mais aussi pour tout argument positif. Ne vous attardez pas sur le bon, vérifiez d’abord s’il y a du mauvais – une fois encore, dans la perception du public.
Opérationnellement, il suffit de faire ce qui devrait être fait dans la communication de tous les jours : toujours commencer par aller sonder les aspirations de vos publics (au sens figuré – donc quali, et non au sens de sondage – donc quanti), et savoir quelles parties prenantes sont susceptibles de réagir fortement à quel argument.
Voilà en tout cas qui réintroduit dans la communication RSE une forte dimension stratégique, qui commence toujours par une attitude d’écoute. Cela ne signifie aucunement qu’un annonceur ne peut jamais communiquer sur ses progrès, s’il en fait… juste qu’il doit, à chaque fois qu’il avance, sonder ses parties prenantes pour s’assurer que ses progrès sont vus de la même manière.
Crédit photo : Jk***, sur Flickr ; image mise à disposition sous un contrat Creative Commons by-nc-sa.
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